Maîtriser la priorisation Agile : découvrez les 4 techniques incontournables !
- Masha Ostroumova, Enterprise Agile Coach
- Oct 20, 2023
- 5 min read

La priorisation est une compétence essentielle pour toute personne au sein d'une équipe Agile, pas uniquement pour les Product Owners ou les leaders Agile. Bien que nous parlions souvent de son importance, comprendre réellement et appliquer efficacement les techniques de priorisation est une autre histoire.
Dans cet article, je vais vous présenter quatre méthodes éprouvées, fréquemment utilisées par les équipes Agile pour perfectionner leurs compétences en priorisation. Chacune de ces approches est unique, mais elles partagent un objectif commun : offrir un maximum de valeur aux clients.
Rédiger des user stories qui définissent clairement et objectivement la valeur est crucial pour réussir la priorisation. Même s’il n’est pas toujours possible de quantifier cette valeur avec une précision absolue, il est impératif de viser une clarté maximale dans les limites des contraintes spécifiques à votre contexte. Passons donc en revue ces quatre techniques pour renforcer la concentration et l’efficacité de votre équipe Agile !
Matrice Valeur/Effort : un outil simple mais efficace
La matrice Valeur/Effort est simple, mais puissante. Voici comment l'utiliser :
Évaluez l’effort requis pour chaque user story. Pas besoin d'une précision extrême : des désignations simples comme "faible" ou "élevé" suffisent. Toutefois, pour plus de profondeur, utilisez une estimation par story points (je traite de ce sujet dans mon article Story Points 101).
Tracez deux axes : l'axe vertical pour la ‘Valeur’ et l'axe horizontal pour l’‘Effort’.
Positionnez vos stories sur le graphique, puis divisez-le en quatre quadrants. Chaque quadrant indique une stratégie :
Haut gauche (Haute Valeur, Faible Effort) : Ce sont vos opportunités faciles et elles doivent être prioritaires dans le backlog.
Haut droit (Haute Valeur, Haut Effort) : Ces éléments demandent une analyse approfondie avant de les entreprendre.
Bas gauche (Faible Valeur, Faible Effort) : Ils ne sont pas urgents mais peuvent servir de tâches de "remplissage" lorsque vous avez des périodes creuses.
Bas droit (Faible Valeur, Haut Effort) : Supprimez ces tâches du backlog sauf si elles sont obligatoires (par exemple, pour des raisons légales ou de conformité).
Cette matrice vous permet d’évaluer objectivement vos tâches en équilibrant la valeur apportée et les efforts nécessaires.
Viabilité / Désirabilité / Faisabilité : élargir la notion de valeur
Si la matrice Valeur/Effort offre une vue simple et efficace, le cadre Viabilité/Désirabilité/Faisabilité ajoute une couche de nuance pour mieux définir la valeur. Cette méthode permet de concilier les désirs des clients et les besoins de l’entreprise tout en tenant compte de la faisabilité.
Prenons un exemple concret : offrir des bons d'achat gratuits de 100 € ravirait vos clients (haute désirabilité), mais ce n’est absolument pas viable pour l’entreprise. À l’inverse, des frais cachés pourraient temporairement gonfler les revenus (haute viabilité), mais ils risquent de frustrer les clients. L’objectif est de trouver des opportunités qui combinent ces deux critères, tout en restant faisables.
Comment l’utiliser ?
Tracez un graphique où l’axe vertical représente la Viabilité (valeur pour l’entreprise) et l’axe horizontal la Désirabilité (valeur pour le client).
Évaluez chaque tâche ou fonctionnalité en termes de faisabilité, que vous pouvez représenter avec une estimation simple (S/M/L/XL) ou des story points.
Priorisez les tâches situées dans le coin supérieur droit (fortement désirables et viables) avec une faisabilité faible à modérée. Ce sont vos priorités absolues.
En adoptant cette approche, vous pouvez identifier les tâches qui génèrent une forte valeur tout en restant réalistes à exécuter.
Scoring pondéré : affiner la priorisation
Si vous trouvez difficile de définir la "valeur", le scoring pondéré est une méthode efficace pour structurer votre priorisation.
Identifiez les critères clés pour votre produit ou projet à ce stade précis. Par exemple : croissance des revenus, expérience client, performance, sécurité, etc.
Attribuez un poids à chaque critère en fonction de son importance (sur une échelle de 1 à 5). Exemple : Sécurité = 5, Expérience client = 3, Performance = 2.
Évaluez chaque tâche ou fonctionnalité par rapport à ces critères, en utilisant une échelle cohérente (par exemple, 1 à 5). Multipliez chaque score par le poids correspondant.
Prenons un exemple concret :
Tâche A : Sécurité = 3 (3x5=15), Expérience client = 2 (2x3=6), Performance = 2 (2x2=4) → Total = 25
Tâche B : Sécurité = 1 (1x5=5), Expérience client = 3 (3x3=9), Performance = 3 (3x2=6) → Total = 20
Dans ce cas, la Tâche A est prioritaire, car elle répond mieux aux critères clés, notamment celui qui est le plus important (Sécurité).
Méthode Kano : des priorités guidées par le client
Si vous avez la possibilité d’interroger directement vos clients sur les fonctionnalités qui les intéressent, la méthode Kano est un outil précieux. Développée par le professeur Noriaki Kano, cette approche classe les fonctionnalités en cinq catégories :
Indispensables : Ces fonctionnalités sont essentielles. Sans elles, votre produit serait rejeté par vos clients (exemple : une chambre d’hôtel avec un lit).
Unidimensionnelles : Plus vous en fournissez, plus la satisfaction client augmente (exemple : la variété d'options de petit-déjeuner).
Attrayantes : Ces fonctionnalités surprennent agréablement vos clients. Elles ne sont pas attendues, mais leur présence crée un effet "waouh" (exemple : un verre de bienvenue à l’hôtel).
Neutres : Ces éléments n’influencent pas significativement la satisfaction (exemple : la couleur des serviettes de bain).
Régressives : Ces fonctionnalités peuvent déplaire ou frustrer (exemple : une interface complexe pour accéder au Wi-Fi).
Comment catégoriser les fonctionnalités ?
Pour chaque fonctionnalité, posez deux questions à vos clients :
Question fonctionnelle : "Comment vous sentiriez-vous si cette fonctionnalité était présente ?"
Question dysfonctionnelle : "Comment vous sentiriez-vous si elle était absente ?"
Les réponses peuvent varier de "Je l’aimerais", "Je m’en fiche", à "Je la détesterais". Ces réponses permettent de positionner la fonctionnalité sur une grille Kano :
Fonctionnelle : "Je m’attends à l’avoir" + Dysfonctionnelle : "Je ne veux pas qu’elle manque" → Indispensable
Fonctionnelle : "Je l’aime" + Dysfonctionnelle : "Je ne veux pas qu’elle manque" → Unidimensionnelle
Fonctionnelle : "Je l’aime" + Dysfonctionnelle : "Je suis neutre" → Attrayante
Fonctionnelle : "Je suis neutre" + Dysfonctionnelle : "Je suis neutre" → Neutre
Fonctionnelle : "Je la déteste" + Dysfonctionnelle : "Je m’attends à l’avoir" → Régressive
Exemple :
Un lit dans une chambre d’hôtel est indispensable ; son absence serait rédhibitoire. Par contre, une bouteille de champagne offerte est une fonctionnalité attrayante : elle n’est pas attendue mais fait plaisir.
Comment prioriser ?
Assurez-vous que tous les indispensables sont en place.
Maximisez les fonctionnalités unidimensionnelles.
Ajoutez des fonctionnalités attrayantes pour surprendre vos clients.
Évitez les régressives, et laissez les neutres en arrière-plan.
Mais attention ! Les attentes évoluent. Ce qui est "attrayant" aujourd’hui pourrait devenir "indispensable" demain. Veillez à régulièrement réévaluer vos fonctionnalités.
Quelle que soit la technique que vous adoptez, l’objectif principal doit toujours être de maximiser la valeur client. Rappelez-vous que la priorisation est un processus continu ; elle s’affine au fur et à mesure que votre produit évolue.
Avec de la pratique, ces techniques deviendront plus intuitives. Bien que votre méthode puisse s'assouplir au fil du temps, veillez à conserver un regard objectif pour des décisions claires et basées sur la valeur.
Enfin, ne cherchez pas à tout prioriser d’un coup. Concentrez-vous sur les éléments prioritaires, et laissez les opportunités émerger au fur et à mesure. Bonne priorisation ! 🎯